Il y a des chansons qui ressemblent à une caresse. Pas un tube, pas un cri. Juste quelques mots posés avec tendresse, comme on adresse une lettre à quelqu’un qu’on aime. Narbonne, mon amie est de celles-là. Une déclaration douce et pudique signée Charles Trenet, enfant du pays, enfant du vent.
Né à Narbonne en 1913, Trenet n’a jamais vraiment quitté sa ville. Même quand il chantait Paris, les voyages ou la mer, on entendait toujours, en filigrane, ce Sud discret, baigné de lumière et de souvenirs. Narbonne, mon amie, c’est son retour à la source, son chant du cœur, loin des projecteurs, près des racines.
Une chanson qui ne joue pas la carte postale
Ici, pas de clichés ni de folklore. Trenet ne chante pas les cigales ou les grandes fêtes. Il parle à Narbonne comme on parle à une vieille amie, avec cette affection simple, un peu mélancolique, qu’on réserve à ce qui nous a vus grandir. On devine les ruelles, les marchés, les étés qui sentent le vent chaud et les pierres blondes. Il ne s’agit pas de faire briller une ville, mais de lui dire merci.
On sent l’homme revenu sur ses pas, apaisé. La chanson prend le temps, ne force rien. Elle a cette douceur qu’on retrouve dans les fins d’après-midi du Midi, quand le soleil décline et que les souvenirs se mettent à parler.
Le Sud des silences
Narbonne n’a pas besoin d’en faire trop. Elle n’est ni tapageuse ni tapageuse. Elle est là, fidèle, posée entre la mer et les vignes, à l’abri du vacarme. Trenet la chante comme ça : calme, solaire, presque pudique. Il y a dans cette chanson une poésie modeste, un attachement profond, celui qu’on garde pour les lieux où tout a commencé.
Et c’est peut-être pour ça que Narbonne, mon amie touche autant : parce qu’elle ne cherche pas à séduire. Elle raconte un lien, une fidélité, un souvenir vivant. Comme un carnet qu’on aurait ouvert après des années, juste pour se rappeler l’essentiel.

Une trace vivante
Aujourd’hui encore, à Narbonne, on n’a pas oublié le « fou chantant ». Sa maison natale se visite, sa rue porte son nom, et parfois, entre deux rafales de vent, il n’est pas rare d’entendre quelqu’un murmurer quelques vers de cette chanson si discrète. Ce n’est pas un monument. C’est mieux que ça. C’est une empreinte.
Charles Trenet n’a jamais eu besoin de crier son amour pour Narbonne. Il l’a chantée doucement, tendrement. Et parfois, c’est ce qu’on retient le plus.
